Japon, des résultats suffisants pour un changement de cap monétaire

Rebond minimal du PIB japonais au dernier trimestre 2022, qui a regagné 0,2 %, après s’être contracté de 0,3 % à l’automne. Les pertes cumulées par l’économie nippone depuis le début d’année 2019 (avant la hausse de la TVA et le covid) était, ainsi, toujours de plus de 1 % à la fin de l’année dernière. En moyenne en 2022, la croissance est ressortie à 1 %, à peine trois dixièmes au-dessus de son acquis de la fin 2021. Au total, des résultats toujours médiocres, mais un argument, peut-être insuffisant pour échapper à un changement de cap de la politique monétaire.

La BoJ s’apprête, en effet, à changer de direction, avec la nomination de K. Ueda à la place de H. Kuroda à sa tête. Une rupture, étant donné que le poste a été refusé par l’ancien adjoint de M. Kuroda sous prétexte qu’il ne pouvait pas refermer la page de la politique ultra-accommodante qu’il avait participé à mettre en place. La nomination d’un gouverneur un peu plus « faucon » suggère une possible mise au second plan des résultats sur la croissance au profit d’une vigilance accrue sur l’inflation.

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Inflation & Stratégie: Les anticipations d’inflation décrochent

Dans un environnement marqué par une baisse des marchés actions et la multiplication de chiffres d’activité en deçà des attentes, les anticipations d’inflation décrochent. Pour les Etats-Unis et la Zone Euro, les swaps d’inflation 5 ans dans 5 ans retrouvent des niveaux supports et leurs points bas de l’année. Étant donné la sensibilité des banquiers centraux à ces anticipations, il n’y a pas de doute que la poursuite de ce mouvement s’accompagnerait de changements dans la conduite actuelle des politiques monétaires. Aux Etats-Unis, cette baisse illustre la forte dépendance de la croissance et de l’inflation aux effets richesse. En Zone Euro, alors que l’amélioration cyclique de l’inflation reste modeste, c’est le ralentissement de la croissance qui en est le principal vecteur et qui perturbe fortement le message optimiste de la banque centrale.

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Au Japon, M. Kuroda a tout son temps, mal lui prendrait de s’en priver

La Banque du Japon est-elle sur le point d’amorcer un exercice de tapering ? L’idée a subitement refait surface ce début de semaine en réaction à la réduction de ses achats de titres longs dans le cadre de ses opérations habituelles d’assouplissement quantitatif. La réaction des marchés ne s’est pas fait attendre, avec un repli immédiat du prix des obligations d’État mais, plus encore, une remontée du cours du yen à l’égard de la plupart des grandes devises. Après des années au cours desquelles les opérations de sauvetage toujours de plus en plus conséquentes de la BoJ ont fini par porter à plus de 92 % du PIB japonais la taille de son bilan et tandis que la FED et la BCE se sont toutes deux engagées sur la voie de la réduction progressive de leur soutien monétaire, l’anticipation d’un tel changement est assez compréhensible. Ceci d’autant plus que l’économie japonaise semble avoir entamé une cure de jouvence l’an dernier. 

Il est, toutefois, peu probable que la banque du Japon ait la latitude d’enclencher une réduction de son soutien monétaire, ceci pour au moins trois raisons.

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Les artifices peu convaincants des «Abenomics»

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Aussi impressionnants soient-ils, les efforts de reflation du Japon ont peu de chances de porter leurs fruits.

La stratégie d’injections massives de liquidités par la BoJ a, certes, occasionné une dépréciation exceptionnelle du yen dont les conséquences sur les marges des entreprises sont, à certains égards, spectaculaires depuis le début de l’année. Mais les effets dépressifs de ce choc compétitif sur les autres pays de la région sont tels qu’ils ternissent, en retour, les perspectives à l’exportation du Japon. Le risque que le Japon exporte sa propre déflation en dehors de ses frontières est, ainsi, au moins aussi élevé que l’objectif d’inflation recherché par les autorités.

Or, sans la capacité d’impulser un renouveau à l’exportation, que peut-on espérer de la stratégie du gouvernement Abe ? L’inflation ne viendra assurément pas de l’intérieur du pays tant le potentiel de croissance est endommagé par les effets du vieillissement de la population quand, le seul changement à même de contrer ces effets démographiques, à savoir l’ouverture du Japon à une immigration massive, ne figure pas au programme du gouvernement.

Les autres mesures promises pour restaurer la croissance potentielle du pays s’apparentent dès lors à un cataplasme sur une jambe de bois. Assise sur le développement de l’offre, la stratégie mise en place par la nouvelle équipe au pouvoir ne pourra avoir aucun effet durable sur la croissance si elle échoue à restaurer la demande.

Difficile dès lors d’acheter l’enthousiasme des marchés financiers. L’envolée du Nikkei depuis le mois de décembre n’est guère compatible avec les perspectives toujours très détériorées de l’économie japonaise. Nous publions aujourd’hui une nouvelle analyse de Frank Benzimra sur ce sujet dont la conclusion sans appel est de vendre le marché japonais.