UEM – Le surcroît de marges à l’exportation confisqué

Faiblesse des ventes au détail, hausse des stocks, contraction des prix à la production et Beige Book très mitigé continuent à mordre sur les anticipations de hausse des taux de la Fed dont le report récurrent finit par évacuer toute probabilité d’un passage à l’acte à horizon prévisible.

Conséquence, les taux à terme américains ont significativement reflué, ne dépassant pas 0,55 % pour les taux à deux ans -au lieu de 0,82 % le 16 septembre- et 1,97 % pour les taux à dix ans, soit leur plus niveau depuis la fin avril.

Taux US

Autre signe de ce changement d’anticipations, le dollar s’affaisse dorénavant contre la plupart des devises, un mouvement qui a propulsé l’euro à 1,15USD dans la journée d’hier, soit une appréciation de 1,7% au cours des sept derniers jours. Si la monnaie unique semble encore faible, toujours inférieure de 10 % à son niveau d’un an auparavant, ce mouvement est toutefois loin d’être anodin.

EURUSD

À ce rythme, les bénéfices retirés de la baisse de la monnaie unique fondent comme neige au soleil, en effet. Ainsi, à supposer que l’euro conserve son taux de change présent contre le billet vert, le surcroît de marges à l’exportation procuré par sa baisse de la fin de l’année dernière refluerait de près de 5 % au printemps à potentiellement moins de 1 % d’ici la fin de l’année.

UEM marges export

Alors que la chute de l’euro n’a pas eu d’effet positif majeur sur l’activité exportatrice des entreprises européennes, le gonflement des marges à l’exportation a, lui, permis d’atténuer les pressions déflationnistes à l’œuvre dans le milieu concurrentiel, bénéficiant indirectement aux perspectives d’investissement et d’emploi de la zone euro. Ce sont ces facteurs de soutien que vient confisquer l’évacuation du scénario de hausse des taux de la Fed et l’affaiblissement renouvelé du billet vert qui, selon notre scénario central, devrait conduire à une remontée de l’euro jusque dans une fourchette de 1,18-1,22USD dans les mois à venir.

Out, la hausse des taux de la Fed

Confirmation de ce que nous avions compris des développements les plus récents, la hausse des taux de la Fed n’est plus rendez-vous. En cause, non seulement la tournure de la conjoncture internationale, à laquelle la Fed consacre relativement peu de ses commentaires, ni les tensions financières, quand bien même ces dernières l’incitent à une plus grande vigilance, mais l’économie américaine elle-même. Deux points des minutes du dernier FOMC justifient sa décision de ne pas relever les taux directeurs :

  • une révision à la baisse du potentiel de croissance structurelle de l’économie américaine, lié à un moindre optimisme à l’égard des gains de productivité, cohérente avec un niveau d’équilibre des taux d’intérêt structurellement plus bas que par le passé ;
  • la persistance de risques à la baisse sur les perspectives de croissance conjoncturelle, conséquence des effets négatifs combinés de la chute de l’activité du secteur pétrolier, de la hausse du dollar et de la dégradation du contexte international.

Ces conditions ont des effets majeurs sur les deux piliers de sa politique monétaire, au sujet desquels la Fed considère que la balance des risques est :

  • à la hausse sur le front du taux de chômage, malgré l’amélioration du marché de l’emploi depuis le début de l’année – il s’agit là d’un changement crucial par rapport aux communiqués précédents-
  • à la baisse sur le front de l’inflation, amenée à s’affaiblir à brève échéance et à ne remonter que graduellement, de sorte qu’elle devrait être «encore inférieure à l’objectif officiel de 2% à la fin de l’année 2018 ».

En somme aucun des critères-clés de son mandat n’est aujourd’hui considéré comme acquis.

Il s’agit d’un changement majeur de perception, renforcé par la communication suivante : «  la persistance de risques à la baisse tant sur la croissance que sur  l’inflation, illustre le fait que ni la politique monétaire ni la politique budgétaire ne sont en position de  protéger l’économie américaine contre des chocs adverses ». Autrement dit, la Fed ne prendra aucun risque, ce qui dans le contexte en présence rend de plus en plus improbable une hausse de ses taux directeurs à horizon prévisible.

 

 

Janet Yellen bientôt félicitée

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Autant dire que la Présidente de la Fed, Janet Yellen, aura été bien inspirée de changer son fusil d’épaule avant la réunion du Comité de politique monétaire du mois de septembre. Avec 112 000 emplois créés dans le secteur privé américain en septembre (après 100 000 en août), une nouvelle baisse du taux de participation de la population en âge de travailler et le repli à 1,6 % du taux de salaire du personnel non cadre, un resserrement monétaire, supposé nécessaire pour faire face aux goulots d’étranglement du marché du travail, aurait fait mauvaise figure.

L’économie américaine n’est assurément pas en bonne passe et c’est dorénavant le spectre d’une récession que scruteront les marchés ; un risque dont la probabilité a singulièrement augmenté à en juger par les enchainements susceptibles de naître de la mauvaise santé de l’industrie ces derniers mois. L’éventualité d’un quelconque resserrement monétaire à horizon prévisible s’en trouve de facto écartée. De quoi, certainement redorer le blason de Madame Yellen, à défaut de répondre à toutes les interrogations soulevées par un tel diagnostic.

Le roi est nu

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La décision de la Fed de laisser inchangé le niveau de ses taux directeurs va beaucoup plus loin que le seul fait de ne pas modifier sa politique monétaire, elle emporte avec elle toute la symbolique d’un passage à l’acte impatiemment attendu depuis l’arrivée à terme de son programme d’achat d’actifs en octobre 2014, à savoir :
1- le caractère transitoire des politiques non-conventionnelles nécessaire pour continuer à donner leur blanc-seing à des pratiques d’envergure presque-planétaire aujourd’hui,
2- la validation du succès des politiques menées depuis la crise de 2008, qui précisément serait donnée par le fait que l’on puisse envisager de s’en passer,
3- l’idée d’une indépendance des banques centrales par rapport aux marchés financiers internationaux et au reste du monde, la globalisation semblant avoir atteint son paroxysme avec la crise financière de ces dernières semaines.
C’est bien pour cela que l’inaction de la Fed est reçue comme une mauvaise nouvelle, éventuellement susceptible de provoquer une nouvelle panique boursière.

Un FOMC, trois scénarios… Une issue ?

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Comment les choses pourraient-elles s’articuler après l’annonce de la décision de la Fed jeudi soir ? Trois scénarios sont envisageables dans le contexte en présence.

Scénario 1 : la Fed privilégie le statu quo, gardant le niveau de ses taux directeurs inchangé, entre zéro et un quart de point. C’est le scénario, à notre avis, le plus probable, susceptible d’offrir quelques semaines d’accalmie sur les marchés financiers ; nous estimons sa probabilité entre 60 % et 65 %.

Scénario 2 : la Fed relève le niveau de ses taux directeurs de 25 points de base tout en conservant un discours suffisamment prudent pour convaincre qu’il s’agira de la seule hausse de cette année : le jeu est périlleux pour les marchés financiers internationaux, mais l’hypothèse semble néanmoins assortie d’une probabilité encore significative, de l’ordre de 20 % à 25 %.

Scénario 3 : la Fed relève le niveau de ses taux d’un quart de point et apparaît suffisamment sereine pour poursuivre la hausse en décembre. Les anticipations sont prises de court ; le dollar s’envole ainsi que les taux longs ; le S&P entrevoit la fin du cycle en cours. L’envolée du dollar va à l’encontre d’une extension du QE de la BCE et les marchés mondiaux emboitent le pas à la correction américaine. La probabilité de ce dernier cas de figure est vraisemblablement inférieure à 20 %.

Cure de jouvence allemande

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L’exode massif des populations syrienne et irakienne à destination de l’UE ces dernières semaines inspire un certain nombre des réflexions sur le plan économique.

– La première, est qu’il s’agit d’un changement aux retombées immédiatement positives pour la croissance, dont l’impact pourrait être suffisant pour amortir le choc en provenance de la dégradation de la situation économique et financière internationale de ces derniers mois ;

– La seconde est que cet appel d’air concerne en premier lieu l’Allemagne, économie dont les perspectives structurelles, jusqu’à présent largement impactées par le processus de vieillissement de sa population, pourraient dorénavant apparaître sous un jour nouveau jour ;

– La troisième est relative aux conséquences de cet afflux d’immigrés sur la politique économique européenne, de facto, moins restrictive, voire stimulante pour la croissance ; en d’autres termes un rééquilibrage susceptible d’améliorer la résonance économique des mesures prises par la BCE en matière de soutien à l’investissement et de lutte contre la déflation.

Au total, des implications majeures, à même de modifier la donne économique des prochaines années et, à terme, l’équilibre des forces au sein de l’UE.

Pékin défile, Draghi se faufile

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Avec un marché chinois à l’arrêt, l’effet d’annonce avait plus de chances d’être un succès. En tous les cas il l’a été. Mario Draghi, le Président de la BCE, en a dit suffisamment aujourd’hui pour convaincre que la BCE était prête à passer à une action de plus grande envergure que son programme de quantitative easing initié au mois de mars.

La BCE est donc sur le qui-vive, prête à faire front à de nouvelles perturbations sur les marchés internationaux et à prévenir une réappréciation de l’euro, notamment si la Fed venait à ne pas modifier sa politique monétaire lors de son prochain FOMC mi-septembre.

L’histoire ne dit pas, toutefois, quelle sera la puissance de cet appel d’air.

L’inertie des marchés obligataires, sujet d’inquiétude pour la BCE

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L’imperméabilité des marchés obligataires à la chute des indices actions et à celle des cours du pétrole est surprenante ces derniers jours, comment l’interpréter ? Il y a trois explications possibles à cette apparente anomalie :
1- L’anticipation persistante d’un scénario de hausse des taux de la Fed. L’explication, bien que crédible, ne constitue toutefois pas une réponse susceptible d’expliquer la situation européenne, notamment marquée par une tendance à l’accroissement des écarts de taux avec le Bund allemand.
2- Des marchés de taux moins préoccupés par la situation économique fondamentale que ne le sont les marchés d’actions. L’explication est peu convaincante et surtout peu conforme à l’écrasement des anticipations d’inflation, plus bases aujourd’hui que les extrêmes enregistrés en début d’année.
3- Un regain de craintes lié à la situation souveraine dans un scénario, au contraire, plus sombre que celui envisagé par les marchés d’actions. L’explication est assez cohérente avec le regain de tensions observé sur les marchés des dettes les plus fragiles. Elle irait toutefois de pair avec une certaine perte de crédibilité des banques centrales dans leur capacité à juguler de nouvelles tensions souveraines en cas de ralentissement marqué de l’activité. On comprendrait mieux dans un tel cas de figure pourquoi la BCE envisage une possible extension de son programme de quantitative easing.