Le sujet des inégalités ne fait guère partie de la panoplie traditionnelle des politiques monétaires dont la mission, même lorsqu’elle vise directement un objectif de plein emploi, s’est généralement contentée d’une approche macro-économique offerte par les statistiques agrégées de croissance, d’inflation, taux de chômage ou taux de salaire moyens. Force est de constater que ce sujet s’est pourtant imposé à l’agenda d’un nombre croissant de banquiers centraux ces dernières années.
Impulsé par Janet Yellen, ce changement semble avoir convaincu un certain nombre d’autres acteurs de la gestion monétaire. Outre-Atlantique, Nell Kashkari, gouverneur de la FED de Minneapolis, a largement relayé cette approche, allant jusqu’à inaugurer en janvier 2017, avec le soutien de l’ex-présidente de la FED, un centre de recherche du nom de «Opportunity and Inclusive Growth Institute» dont la mission est de promouvoir la recherche destinée à favoriser une croissance plus « inclusive pour tous les Américains et de contribuer, ainsi, à un meilleur accomplissement du mandat de la FED en faveur du plein emploi ».
En Europe, Mario Draghi, a fait de ce même thème un élément important du dosage de sa politique monétaire ces deux dernières années. Comme l’avait initié Janet Yellen à partir de janvier 2014 en développant une série d’indicateurs complémentaires au taux de chômage, le président de la BCE a régulièrement fait référence aux insuffisances du marché de l’emploi (« labour market slack ») pour se prémunir des risques de mésinterprétation d’une statistique, le taux de chômage, de moins en moins représentative de la réalité économique : sous-emploi, emploi partiel contraint, multi-salariat… sont ainsi régulièrement mentionnés par le Président de la BCE pour justifier la poursuite d’une politique hyper-accommodante en dépit de conditions économiques nettement meilleures en zone euro depuis le début de l’année dernière.