La Chine face à son déclin démographique

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Réunis en plénum dans le but de définir les grandes orientations économiques de la Chine pour les prochaines années, les dirigeants chinois n’ont probablement pas inscrit à l’agenda de leur Congrès la question démographique. Et pourtant, s’il est un défi économique auquel la Chine sera inévitablement confrontée dans les toutes prochaines années c’est bien, devant tous les autres, à celui du vieillissement accéléré de sa population. Les projections de l’ONU, référence en la matière, sont à ce titre sans appel. D’ici à 2040, l’âge médian de la population chinoise devrait augmenter de plus de onze années, pour atteindre 46 ans, le nombre de Chinois en âge de travailler s’éroderait de 10 %, celui des jeunes adultes de 15 à 44 ans se réduirait de 200 millions et celui des plus de 65 ans augmenterait d’autant ; la proportion d’actifs pour deux séniors chuterait ainsi de dix-huit actuellement, à cinq en 2040. Le vieillissement de la Chine est parti pour être particulièrement rapide, à bien des égards, plus rapide, même, que celui du Vieux Continent.

Les conséquences du vieillissement des populations sont assez mal connues et les recherches sur le sujet concernant surtout les pays développés ne sont guère juxtaposables au cas de la Chine. Que cette absence de référence n’empêche pas, toutefois, de prendre la mesure de ce que nous annoncent les tendances démographiques des vingt-cinq prochaines années. Après avoir façonné les principales étapes du développement économique chinois, la génération des baby-boomers de l’ère post révolution des années 1950 à 1975 emportera avec elle l’essentiel de ce qu’elle a procuré durant sa jeunesse à l’Empire du Milieu, et qui en a fait l’extraordinaire essor depuis quatre décennies : une ressource pléthorique en main d’œuvre, d’abord, une ressource tout aussi inédite d’épargne, ensuite.

Scénario 2013-14 : pas d’effet ketchup

Si l’amélioration des perspectives en zone euro est bien venue, les freins structurels à la croissance mondiale sont trop nombreux pour envisager une véritable embellie des conditions économiques internationales à horizon 2014. A respectivement 3,1% et 3,3%, nos prévisions de  croissance pour cette année et l’an prochain sont dans la lignée de 2012 et ne laissent aucune place pour un retour de l’inflation ou un crash obligataire. 

Du côté des bonnes nouvelles : les inquiétudes majeures du début d’année sont écartées

  • En zone euro : le climat de confiance des ménages s’améliore au fur et à mesure de l’atténuation des politiques d’austérité ; les échanges intra régionaux devraient prendre le relai, sous peu ; la zone euro sort de récession avant la fin de l’été.
  • L’économie américaine surmonte les effets du fiscal cliff : la reprise immobilière n’est plus contestable, richesse des ménages et profits des entreprises culminent sur des records historiques, le chômage reflue.

Du côté des moins bonnes : les freins structurels à la croissance se multiplient  

  • L’Europe se stabilise mais ne redémarre pas. Le changement de cap de la politique économique est beaucoup trop tardif et trop timoré, les questions clés sur l’avenir de la zone euro restent entières.
  • Les perspectives américaines sont pénalisées par les faibles gains de productivité et le bas niveau du taux d’épargne. Le haut niveau des profits des sociétés ne suffit pas à envisager d’accélération suffisante des créations d’emplois, les effets richesse sont contraints par le bas niveau du taux d’épargne des ménages. Nos prévisions sont revues à la baisse à 2,2 % pour 2014.
  • L’impulsion de politique économique dont aurait besoin l’économie mondiale n’aura pas lieu. Les actions désordonnées ont réduit leur portée des initiatives monétaires. La force de frappe est dorénavant très limitée.
  • Les insuffisances structurelles des pays émergents sont de plus en plus handicapantes. La transition chinoise est compliquée par la perte trop rapide du soutien à l’exportation ; l’inflation endémique refait surface dans les autres grands pays émergents.

Un scénario mondial en demi-teinte : l’horizon se dégage trop peu pour évacuer les risques 

  • Peu de changements à notre scénario 2013 mais une nette révision à la baisse pour 2014
  • La croissance mondiale revue à 2,9 % pour 2013 et 3,3 % pour 2014, contre respectivement 3,1 % et 4,1 % en janvier
  • Nettes révisions à la baisse de nos prévisions  2014 sur la Chine et le Brésil, à respectivement 7 % et 3 % au lieu de 7,5 % et 4 % en janvier
  • Crash obligataire ? Pas pour tout de suite
  • Le coup de mou de la croissance américaine au second semestre prévient un retrait trop rapide du soutien monétaire de la Fed
  • Les taux longs américains se stabilisent sous les 2,5% jusqu’à la fin de l’année. L’instabilité s’accroît l’an prochain alors que le taux de chômage américain reflue vers 6,5 %
  • Devises : l’euro reste ferme, à 1,35 USD d’ici la fin de l’année. Notre prévision est revue à la hausse pour 2014
  • Des marchés d’actions plus vulnérables à la faible croissance structurelle

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Quand la Chine se replie sur elle-même…

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A la question d’une possible fermeture de l’économie chinoise récemment posée dans notre dernier moniteur du commerce mondial, nous répondons aujourd’hui par l’affirmative : l’économie chinoise se replie bel et bien sur elle-même.

Ce mouvement s’explique par une combinaison de facteurs qui ont tout lieu de se révéler durables, à savoir :

  • un changement de nature de l’investissement inhérent à la tertiarisation de l’économie,
  • une plus grande présence des entreprises étrangères sur le territoire chinois,
  • une stratégie de développement accéléré vers les secteurs à plus forte valeur ajoutée,
  • une plus grande contrainte extérieure.

Après dix années au cours desquelles l’ouverture du marché chinois a fini par faire de la Chine le principal contributeur à la croissance des échanges internationaux,  les conséquences de cette transition sont potentiellement considérables et d’ores et déjà notables dans un certain nombre de secteurs clés de l’économie mondiale. On constate en particulier :

  • une anémie de la demande chinoise de biens d’équipement (43 % des importations chinoises en 2005, le tiers aujourd’hui),
  • de moindres débouchés pour les produits à haute technologie, que la technicité ne protège plus de la concurrence chinoise,
  • la percée de producteurs chinois dans bon nombre de produits bruts transformés, tels l’acier ou de nombreux pans de l’industrie chimique, réduisant de facto la dépendance du pays aux fournisseurs étrangers.

Les effets en cascade de ce changement de paradigme chinois sont considérables :

  • sur les pays de la chaîne de production chinoise, victimes d’un ralentissement marqué de leur activité : il s’agit en tout premier lieu de Hong-Kong, de la Malaisie ou de Taïwan,
  • sur les fournisseurs de biens d’équipement de la Chine que sont en particulier l’Allemagne, le Japon et la Corée du sud,
  • sur la dynamique du commerce international et sur celle, en retour, de la croissance économique mondiale aujourd’hui privée des effets d’entraînement issus de la multiplication des échanges,
  • enfin, sur les revenus des entreprises européennes qui dans les secteurs touchés – les biens d’équipement en particulier- ne retrouveront pas dans les autres marchés émergents les pertes de débouchés qu’elles enregistrent aujourd’hui sur le marché chinois.