Fed, un bien mauvais timing !

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On aurait pu imaginer meilleur timing que la veille de la publication des chiffres de croissance du troisième trimestre pour la confirmation qu’une hausse des taux restait envisagée par le FOMC pour le mois de décembre. Car, force est de constater que les données publiées hier ne servent guère la cause défendue par la Fed dans son dernier communiqué. Au-delà de l’instabilité inhérente à toute comptabilité trimestrielle, c’est bien la confirmation d’un ralentissement de la croissance et l’absence de quelconques pressions inflationnistes que décrivent les estimations préliminaires du PIB du troisième trimestre.

US PIB

Vous avez aimé Mario, pas sûr que vous aimiez Janet

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Texte écrit pour publication sur le site de Boursorama le 29/10/2015

Changement de décor, la Fed maintien la possibilité d’une hausse de ses taux d’intérêt en décembre ! La surprise est grande tant son communiqué du mois de septembre et, plus encore, les médiocres développements de l’économie américaine de ces derniers temps avaient convaincu qu’elle ne pourrait se permettre d’amorcer un cycle de hausse des taux avant la fin de l’année. Passera-t-elle à l’acte pour autant le 16 décembre ? Rien n’est moins sûr, ceci pour au moins deux raisons.

Suspens jusqu’au bout

Analyse du FOMC du 28 octobre.

Contrairement à nos attentes, la Fed ne ferme pas la porte à une hausse des taux en décembre, laissant même celle-ci totalement ouverte… en fonction des progrès, tant observés qu’anticipés, sur ses deux objectifs.

Étonnant, pour le moins, à en juger par la tournure de la conjoncture américaine de ces dernières semaines (voir les illustrations de notre commentaire de ce matin). Tout aussi étonnant est le résumé de la situation économique, passant sous silence la plupart des sujets de déception récents pour qualifier la croissance de modérée, l’investissement et les dépenses de consommation en croissance solide et l’immobilier en amélioration plus marquée ; la détérioration des exportations nettes étant le seul point négatif clairement souligné.

Décidément la lecture de la situation en présence à bien changé en six semaines malgré une avalanche d’indicateurs qui, pourtant, semblaient abonder dans le sens défendu par la Fed en septembre. Comment expliquer ce revirement ?

Nous voyons trois explications possibles :

  1. La Fed réagi à l’incompréhension provoquée par son communiqué de septembre en prenant le contre-pied de ce qu’elle a dit il y a six semaines, préférant brosser les marchés dans le sens du poil plutôt que de risquer de créer une nouvelle vague de panique. Une telle posture dénoterait un problème de communication majeur et un manque problématique d’assurance et d’indépendance à l’égard des marchés.
  2. La Fed prend le risque de se tromper dans son diagnostic conjoncturel en passant sous silence les développements susceptibles de remettre en question son scénario. Elle pourrait donc commettre ce que nous considérerions comme une erreur majeure en remontant le niveau de ses taux le 16 décembre.
  3. Les « colombes » sont en position de faiblesse au sein du board de la Fed et n’ont pu obtenir de ce dernier la mise à l’écart d’une éventuelle hausse des taux en décembre que les faucons continuent à envisager comme possible ou souhaitable. Au même titre que la précédente, cette dernière hypothèse, la plus convaincante, pose toutefois d’emblée la question du risque d’un passage à l’acte en décembre.

La partie s’annonce donc tendue et la crispation autour des publications économiques à venir, proportionnelle. Les bonnes nouvelles, susceptibles de faire monter les anticipations de hausse des taux, ont tout lieu de provoquer d’importantes tensions ponctuelles sur les taux à long terme tandis que les mauvaises, susceptibles d’être perçues comme insuffisantes pour prévenir une hausse des taux, risquent d’avoir un retentissement plus important sur les marchés d’actions.

Au total, le calme n’est pas près de revenir d’ici au 16 décembre !

 

Un communiqué de la Fed des plus « dovish » ce soir

Dans la partie de son communiqué consacrée aux développements économiques depuis sa dernière réunion de septembre, la Fed aura bien du mal à trouver de quoi rosir le tableau d’une économie américaine en proie à un risque de plus en plus grand de récession. Mentionnera-t-elle cet état de fait ? C’est peu probable mais, s’agissant de l’appréciation portée sur l’évolution de la balance des risques assortis aux perspectives américaines, nul doute que celle-ci penche de plus en plus nettement du côté négatif. Revenons sur les principaux traits de la conjoncture qui traditionnellement figurent dans le communiqué du FOMC :

  • L’activité industrielle a continué à se détériorer. Seront mentionnées ici les retombées négatives de la chute de l’activité dans le secteur énergétique et le contrecoup de la hausse du taux de change du dollar sur fond d’un environnement international difficile.
  • L’activité des services a plutôt bien résisté et s’est développée plus solidement depuis le début de l’été mais le momentum de la croissance s’y est tassé ces derniers temps, du fait principalement de deux raisons :
    • Le resserrement des marges des entreprises
    • Une relative frilosité des consommateurs malgré les retombées positives de la baisse des prix de l’énergie.
  • L’ensemble a pesé sur les dépenses d’investissement dont on peut légitimement anticiper une contraction ces derniers mois, en bonne partie liée à l’impact négatif du secteur énergétique sur les dépenses d’équipement et, plus généralement, à la baisse du degré de d’utilisation des capacités productives.

US durables good orders & TUC

  • Enfin, les exportations américaines ont souffert des effets combinés de la hausse du taux de change et d’une demande internationale ralentie, notamment impactée par la situation des pays émergents.

US exports et ISM

Au total, la Fed communiquera vraisemblablement sur un net ralentissement de la croissance au troisième trimestre, période durant laquelle le rythme de hausse du PIB devrait avoir été divisé par deux par rapport au deuxième trimestre.

Son appréciation sur les deux piliers de sa fonction de réaction, le taux de chômage et l’inflation, ne devrait pas aller à contre sens.

  • Nul doute que les déceptions sur le front des créations d’emplois seront soulignées par la Fed pour justifier sa prudence passée, d’autant que bon nombre des indicateurs suivis pour jauger de l’amélioration des conditions du marché du travail se sont également retournées dans le courant de l’été.
  • Quant à l’inflation, les derniers développements renforcent assez clairement sa communication du mois de septembre, à savoir : les risques sont à la baisse. Difficile en effet de trouver dans le détail des données sur l’environnement de prix de quelconques raisons d’inquiétudes, au-delà des loyers qui, pour  l’instant, n’ont aucun effet de diffusion sur le reste de l’économie ou les salaires.

On voit mal dès lors comment la Fed pourrait maintenir ses guidances sur les développements à venir en matière de politique monétaire, notamment sur l’éventualité d’une hausse des taux d’ici la fin de l’année, soit dans six semaines. La question est donc, davantage, sur la manière dont elle évacuera ce scénario malencontreusement martelé depuis le printemps sans se discréditer et sans risquer de créer un nouveau vent de panique sur les marchés financiers.

La BCE ferait bien d’économiser ses cartouches

La BCE annoncera-t-elle un élargissement de son programme d’achat d’actifs demain ? Ce n’est pas impossible si l’on en juge par le bas niveau d’inflation en présence et l’évidence que cette situation risque de durer bien plus longtemps qu’escompté. Pour autant, cet argument est-il suffisant ? Le débat est ouvert, en particulier sur l’opportunité de faire des annonces dès ce mois-ci, ceci pour au moins quatre raisons. Lire la suite…

Les données en trompe l’œil de l’immobilier américain

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Si les statistiques américaines ont souvent déçu ces derniers temps, les nouvelles sur le front immobilier ont été largement épargnées : en septembre, le climat des affaires auprès des constructeurs a retrouvé son plus haut niveau depuis 10 ans quand les mises en chantiers de logements neufs ont signé une progression de 6,5 %, correspondant à une croissance annuelle de 17,5 %. À ce rythme, nul doute que le marché de la construction se porte bien. La situation n’a pourtant pas grand-chose de comparable avec ce qu’a connu l’économie américaine avant la crise de 2008, en particulier parce que les retombées de cette bonne tenue du marché de la construction ne sont guère perceptibles au-delà du marché immobilier lui-même. Comment l’expliquer ?

PIB chinois, cherchez l’erreur…

Les dernières statistiques chinoises maintenant publiées, soulèvent plus de questions qu’elles n’apportent de réponses, retenant de prendre pour argent comptant les messages envoyés.

À première lecture, il n’y a pas péril en la demeure chinoise :

  • La croissance réelle du PIB aurait décéléré d’un dixième au cours des quatre derniers trimestres par rapport à ce qu’elle aurait fait durant les quatre trimestres précédents, à 6,9 % contre 7 % ; de nombreux pays, y compris parmi les émergents se satisferaient de tels résultats !
  • Mieux, la progression du PIB sur un trimestre aurait été de 1,8 % au troisième trimestre, rigoureusement identique à celle du deuxième. L’économie chinoise conserverait donc un taux de croissance particulièrement vigoureux, en l’occurrence, le meilleur observé au cours des huit derniers trimestres à l’exception du troisième trimestre 2014 au cours duquel la hausse du PIB réel aurait atteint 1,9 %. Le ralentissement serait donc des plus graduels ne dépassant pas un dixième en moyenne pour chacun des trimestres 2015 par rapport à 2014.

PIB reel Chine

Reste que ces résultats sont difficilement réconciliables avec les indicateurs, par ailleurs, publiés.

  • Quid des enquêtes PMI selon lesquelles la croissance chinoise aurait subi une décélération marquée comme suggéré par le repli de deux points de l’indice PMI synthétique, passé de 51 points en moyenne au deuxième trimestre à 49 au troisième ?

PMI Chine

  • Quid de l’impact du ralentissement marqué de l’activité industrielle sur le PIB au cours du troisième trimestre, notamment de la chute de la croissance du secteur automobile ?

VA industrie Chine

  • Quid enfin, des pressions déflationnistes aujourd’hui à l’œuvre dont témoignent notamment l’écart dorénavant négatif entre la croissance nominale et réelle du PIB chinois ?

PIB reel et nominal Chine

Difficile, au total, de trouver dans les données publiées ce matin un quelconque réconfort sur la situation conjoncturelle de l’économie chinoise à ce stade.

Le grand retour de l’Allemagne

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Emblème de la réussite à l’exportation et économie vieillissante pour laquelle les perspectives de consommation n’ont a priori rien de très porteur, l’économie allemande est-elle vouée au déclin dans un monde où la dynamique des échanges mondiaux de marchandises semble structurellement entamée ? C’est en ces termes que de nombreux observateurs sont tentés d’aborder la question allemande aujourd’hui, concluant pour la plupart aux mêmes inquiétudes que celles que nous avions formulées début 2014 lorsque nous nous étions emparés de cette question (voir « Allemagne, l’heure des choix », PPT du 28 janvier 2014). L’économie allemande semble pourtant s’éloigner de plus en plus de ces clichés, au point peut-être de préparer son grand retour. S’il est bien difficile d’en prendre le pari dès à présent, notamment après l’affaire Volkswagen, les développements de ces derniers trimestres forcent incontestablement à se poser la question.