En s’obstinant à faire baisser l’euro, M. Draghi fragiliserait un peu plus la situation internationale
La nouvelle chute des cours du pétrole sur fond de faiblesse persistante des chiffres d’inflation et de nette dégradation du contexte financier ont ravivé les anticipations d’un geste supplémentaire de la part de la BCE et limité la tendance au raffermissement de l’euro dollar que suscite, par ailleurs, la multiplication des inquiétudes au sujet de l’économie américaine.
Mario Draghi serait, toutefois, probablement mal inspiré de suivre ces tendances. Car non seulement les actions susceptibles d’être prises par la BCE n’ont pas le pouvoir d’avoir un quelconque impact sur les cours du pétrole à l’origine du regain de pressions déflationnistes, mais elles pourraient, même, venir renforcer le stress sur ce marché compte-tenu de leurs effets induits.
Ce n’est pas par l’instauration de taux de dépôts négatifs que l’action de la banque centrale a le plus d’impact sur la situation économique et l’inflation mais par son effet sur le taux de change de l’euro dont la baisse permet de gonfler les marges à l’exportation et d’inflater les prix des biens importés. Or, il faudrait un plan très conséquent pour faire se replier le cours de la monnaie unique un tant soit peu substantiellement dans le contexte présent. À supposer que la BCE parvienne à cette fin, un tel mouvement viendrait, qui plus est, compliquer la donne internationale, en particulier par ce qu’il pourrait impliquer côté chinois et, de facto, asiatique ; à savoir une nouvelle vague d’ajustement des devises, elle-même éminemment nocive pour les perspectives de croissance… et donc les cours du pétrole !
Nous sommes bien au point, en effet, où nul ne peut agir sans prendre en compte les effets en cascade de ses actes et ce qu’ils sont susceptibles d’engendrer mondialement. En sous estimant cette réalité, la Fed a déjà amplement participé à déstabiliser le fragile équilibre mondial ; en s’obstinant à faire dévisser l’euro, une action de la BCE aurait potentiellement le même effet, ruinant ainsi toute chance de bénéficier des avantages recherchés.
Que reste-t-il donc ? Force est de constater que la BCE n’a plus beaucoup de munitions face au regain de stress en présence, sinon des actions de surface qui, in fine, n’auront aucun impact durable. Il lui reste l’option d’un plan massif de financement de l’investissement. Mais sans doute faudra-t-il attendre que nos politiques se réveillent face à l’urgence de la situation en présence avant de pouvoir imaginer qu’une telle issue puisse être sérieusement considérée. Cela prendra vraisemblablement longtemps.