Depuis le 20 janvier, les semaines s’enchaînent à un rythme effréné dans une course folle vers l’abîme, sans que l’on puisse prédire la forme que prendra ce dernier, ni ses conséquences, surmontables ou… cataclysmiques.
Les provocations de l’administration américaine ont fini par déboucher sur ce que l’on redoutait : la loi du Talion. C’est, donc, « œil pour œil, dent pour dent ». L’issue ne pouvait pas être différente face aux agressions unilatérales répétées qui ne laissent aucune porte ouverte au dialogue. Le jeu risque néanmoins d’embarquer les uns et les autres vers des terrains extrêmes qu’aucun, ni même son principal protagoniste, n’avait imaginés. A la logique du « je remonte mes droits de douanes, tu répliques, je frappe encore plus fort », les choses vont vite et la montée du mercure s’affole en territoires de moins en moins prévisibles.
L’engrenage protectionniste enclenché débouchera, c’est quasiment acquis, sur plus d’inflation. De quelle ampleur et avec quelles conséquences ? La réponse est encore inconnue, entre les mains des décisions politiques, à bien des égards imprévisibles, et, sans doute dans une moindre mesure, des banques centrales. A la seconde question : « Le choc de demande qui en résultera, suffira-t-il à éteindre le feu ? », nul ne peut, davantage, répondre, notamment parce qu’on ne sait prédire si une récession américaine permettrait de retrouver un cadre de gouvernance plus serein, ou l’inverse.
L’ensemble crée un environnement de rare imprévisibilité. Les chocs à venir de l’empilement des droits de douane et des changements tectoniques de la géopolitique mondiale, impliquent une remise à plat de la plupart des logiques productives et commerciales issues de trois décennies de mondialisation « heureuse », durant lesquelles l’accès aux marchés mondiaux des biens, des services, des matières premières et du capital n’a connu que les entraves ponctuelles de frictions passagères. Les ruptures en cours, on l’a bien compris, ne sont pas seulement tarifaires, elles vont bien au-delà, sans indiquer précisément dans quelle direction et jusqu’où.
Alors, les risques financiers montent en puissance. Comment pourrait-il en être autrement ? Au cours du mois écoulé, les indices américains ont enchainé les corrections avec à leur passif, une perte de plus de 7 % du Dow Jones et de 11 % du Nasdaq. Si les espoirs suscités par les initiatives européennes inespérées de ce début de mois ont efficacement mis à l’abri les valeurs européennes, on aurait tort de penser que les choses seront faciles. Les bouleversements à venir sont incommensurables. Il va falloir parvenir à se projeter dans un monde nouveau, au sujet duquel nous ne savons rien ou presque.