Face au changement de braquet des marchés américains, les atouts européens

Parmi les interventions les plus remarquées du nouveau secrétaire d’État américain au Trésor, celle du 6 février a marqué les esprits. Les taux d’intérêt à long terme américains pourraient-ils être durablement influencés par l’ambition de Scott Bissent d’en faire baisser le niveau, au détriment des facteurs qui président normalement à leur formation ? C’était peu crédible. C’est, pourtant, ce qu’a réussi l’administration américaine dont les réformes en cours commencent à instiller de sérieux doutes sur leurs effets sur la santé de l’économie américaine !
Conséquence, la réception par les marchés des annonces de l’équipe au pouvoir a changé de nature. Les menaces de droits de douanes, perçues comme inflationnistes tant que dominait le consensus d’une croissance infaillible, ont l’effet inverse dès lors que ce dernier vacille. Sans matelas de protection d’une croissance robuste, pas de place, en effet, pour des chocs de prix sans impact négatif immédiat sur la demande, ni, de facto, pour une préservation des marges des entreprises, qui se verront contraintes d’absorber une proportion plus importante des hausses de taxes à l’importation. Les enchaînements n’ont, ainsi, plus grand-chose à voir avec ceux qui prévalaient en tout début d’année : les taux d’intérêt refluent plutôt qu’ils ne remontent à l’annonce de hausses imminentes des droits de douanes et les actions trébuchent.
Après être nettement retombé depuis l’été, le risque de récession pourrait-il réapparaître ? C’est l’éventualité contre laquelle les investisseurs commencent à se couvrir, avec pour conséquence des ruptures de tendances de la plupart des classes d’actifs : repli du dollar, aplatissement de la courbe des taux, surperformance des valeurs défensives, regain de volatilité…
L’Europe a plutôt tiré son parti de cette configuration ces dernières semaines. De ce côté-ci de l’Atlantique, l’humeur des marchés est apparue -presque- au beau fixe en dépit des menaces en présence. Pour la première fois depuis longtemps les indicateurs de surprise économique y étaient mieux orientés qu’aux Etats-Unis. Les anticipations d’inflation se repliaient et les courbes de taux se repentifiaient.Les valeurs cycliques européennes ont de fait mieux résisté que les américaines, notamment portées par le déploiement d’un effort militaire sans précédent et les résultats de législatives allemandes qui augmentent les chances que le futur chancelier puisse former une coalition agileDans un tel contexte, les annonces de D. Trump sont tombées comme un couperet. La mise à exécution de droits de douanes à 25 % sur les importations européennes à partir du 1er avril est une nouvelle déclaration de guerre économique face à laquelle le Vieux continent est mal loti. Si la BCE peut parvenir à temporiser les effets en cascade de ces annonces, c’est du côté politique que se jouera la partie dans les toutes prochaines semaines.
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