Commerce mondial : une reprise sans les émergents

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Les échanges mondiaux ont retrouvé un peu de vigueur depuis la fin de l’été. L’amélioration de la conjoncture européenne explique une bonne part de cette embellie. De son côté, la demande américaine se réoriente plus favorablement depuis le milieu d’année. Enfin, les importations japonaises accélèrent, affichant une croissance de 5 % l’an en volume au cours des derniers mois malgré la forte dépréciation du yen. L’amélioration est donc générale et commence à porter ses fruits en matière d’activité, tout au moins du côté des pays développés.

Manquent, en effet, à ce tableau réconfortant les pays émergents pour lesquels la situation témoigne toujours d’une anémie atypique de croissance de la demande en importations. À l’origine de cette anomalie : la faiblesse des achats chinois et ses effets de diffusion sur l’activité exportatrice des autres pays émergents, le nouveau rôle joué par le Japon et l’inertie de la demande de biens d’investissement. La locomotive du commerce intra régional asiatique et, plus largement, celle de l’ensemble des pays émergents s’en trouvent très ralenties.

Ces tendances pondèrent l’enthousiasme suscité par les signaux encourageants en provenance du monde développé.

Quand la Chine se replie sur elle-même…

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A la question d’une possible fermeture de l’économie chinoise récemment posée dans notre dernier moniteur du commerce mondial, nous répondons aujourd’hui par l’affirmative : l’économie chinoise se replie bel et bien sur elle-même.

Ce mouvement s’explique par une combinaison de facteurs qui ont tout lieu de se révéler durables, à savoir :

  • un changement de nature de l’investissement inhérent à la tertiarisation de l’économie,
  • une plus grande présence des entreprises étrangères sur le territoire chinois,
  • une stratégie de développement accéléré vers les secteurs à plus forte valeur ajoutée,
  • une plus grande contrainte extérieure.

Après dix années au cours desquelles l’ouverture du marché chinois a fini par faire de la Chine le principal contributeur à la croissance des échanges internationaux,  les conséquences de cette transition sont potentiellement considérables et d’ores et déjà notables dans un certain nombre de secteurs clés de l’économie mondiale. On constate en particulier :

  • une anémie de la demande chinoise de biens d’équipement (43 % des importations chinoises en 2005, le tiers aujourd’hui),
  • de moindres débouchés pour les produits à haute technologie, que la technicité ne protège plus de la concurrence chinoise,
  • la percée de producteurs chinois dans bon nombre de produits bruts transformés, tels l’acier ou de nombreux pans de l’industrie chimique, réduisant de facto la dépendance du pays aux fournisseurs étrangers.

Les effets en cascade de ce changement de paradigme chinois sont considérables :

  • sur les pays de la chaîne de production chinoise, victimes d’un ralentissement marqué de leur activité : il s’agit en tout premier lieu de Hong-Kong, de la Malaisie ou de Taïwan,
  • sur les fournisseurs de biens d’équipement de la Chine que sont en particulier l’Allemagne, le Japon et la Corée du sud,
  • sur la dynamique du commerce international et sur celle, en retour, de la croissance économique mondiale aujourd’hui privée des effets d’entraînement issus de la multiplication des échanges,
  • enfin, sur les revenus des entreprises européennes qui dans les secteurs touchés – les biens d’équipement en particulier- ne retrouveront pas dans les autres marchés émergents les pertes de débouchés qu’elles enregistrent aujourd’hui sur le marché chinois.