La situation sur le marché de la dette américaine s’est envenimée après la baisse de la notation de l’agence Moody’s de vendredi dernier et les taux à 30 ans ont franchi le Rubicon en milieu de semaine, pour s’établir temporairement près de 5,15 % jeudi. Si le vote, de justesse, du méga programme de baisses d’impôts républicain par la Chambre des représentants a fini par emporter la confiance des investisseurs, le contexte n’en reste pas moins tendu et la menace d’un regain de volatilité des marchés de taux et d’actions toujours présente.
L’intensification des tensions obligataires sur le marché américain s’est répandue comme une traînée de poudre dans le reste du monde développé ces derniers jours, avec pour résultat une montée généralisée des taux à long ou très longs termes, en Europe, mais également en Asie, Japon en tête de gondole, où la situation déjà tendue depuis le début de l’année a pris un tour critique. Les rendements des JGB à très long terme se sont envolés depuis le début de l’année, à quasiment 3 % pour les 30 ans, un record.
La poudrière ouverte aux Etats-Unis essaime, donc, et, s’il est une leçon à retenir de ces derniers jours, c’est que les choses vont vite.
Signe de défiance généralisée face aux dérives budgétaires imposées tant par les politiques de défense que par les réponses aux menaces protectionnistes américaines, dans un contexte d’incertitudes persistantes sur les perspectives d’inflation, les explications, outre les facteurs fondamentaux, ne marquent pas pour justifier la multiplication des foyers de tensions obligataires à travers le monde.
Les banques centrales ne peuvent, à l’évidence, ignorer ce changement de contexte. Dans quelle mesure celui-ci interfèrera sur leur choix de politique monétaire est, toutefois, encore très incertain et, probablement, variable selon les cas.
Une chose semble pourtant sûre : les tensions sur les taux à long terme aujourd’hui observées ne sont pas le reflet d’une amélioration des perspectives de croissance économique mais traduisent une double perte de confiance : 1) dans la maîtrise des comptes publics par les gouvernements 2) dans la capacité des banques centrales à contrôler l’inflation à terme. Des conditions qui devraient conduire ces dernières à réagir par plus de vigilance, tant du moins qu’elles en ont la latitude. C’est précisément l’enjeu de la préservation de leur indépendance. Une question qui pourrait ne pas toucher seulement la Fed aujourd’hui.